chapitre 1
Je m'appelle ESTIMAUVILLE, pur-sang anglais et ceci est mon journal de bord
JANVIER
Samedi 10 janvier 2015
Aujourd’hui, c’est le premier jour de ma nouvelle vie. Je ne le sais pas encore, mais bien des choses se modifient. Ce que je sais par contre, c’est que j’ai voyagé toute la journée. A mon arrivée, dans un lieu nouveau, il y a du monde autour de moi, des comédiens parait-il. Je ne sais pas trop ce qu’est un comédien, alors plusieurs… pour moi c’est juste une groupe d’humains, sous des parapluies avec des appareils photos et des caméscopes.
J’ai l’impression d’être une star. Sauf que je n’en suis pas une, je veux dire profondément pas une. Je suis un gars simple et gentil. La grosse tête ce n’est pas mon truc. Je suis un gars qui se la joue cool.
Bref, revenons, à mon récit. Me voici dans un herbage boueux. J’ai vite repéré la partie drainée. C’est ma place attitrée. A côté, sur la parcelle voisine, il y a deux juments, une alezane avec une couverture qui se prend pour une altesse royale et sa consœur qui reste un peu en retrait. Mais je vois bien que celle-ci est une lady, toute en petites manières, en petites pauses gracieuses. Elle et moi sommes de la même couleur grise, enfin blanche, enfin blanc boue, hiver oblige.
Sous le pré, en dessous, se trouvent deux garçons, deux trotteurs, un alezan et un bai-brun. Des gars cools, ça va le faire entre nous. Le grand, c’est lui le patron, je n’ai rien contre. Ce n’est pas un méchant. Il a une autorité naturelle que je ne pense même pas remettre en cause. Garde le trône le gars, moi, je n’en veux pas. D’abord je ne sais pas combien de temps Je vais rester ici. Ça semble assez sympa. Le soir, on rentre dans une grande écurie. Mazette ! Je ne vous parle pas des boxes. Il y a de la place. Tant mieux pour Altesse première et le Patron qui sont immenses. La paille est belle, le foin sent le réglisse, hum de quoi réveiller les appétits. Aujourd’hui, c’est le premier jour de ma nouvelle vie.
Dimanche 11 janvier
Deuxième jour. La dame de la maison m’a collé sur le dos une couverture toute neuve, satinée et bleue marine. Il parait que je suis beau ainsi... Ouais, trop proprinet, trop premier de la classe. La première chose que j’ai fait lorsque je suis arrivé dans mon pré, a été de trouver un endroit, bien gras, bien boueux, bien sale, et je me suis roulé, roulé et roulé. Et j’ai adoré. A présent ma couverture est brunâtre. J’aime bien. J’avoue, je suis assez content de moi. A présent, elle est à moi. C’est Ma couverture, à moi, colorée, cochonnée à ma façon. J’aime bien.
Lundi 12 janvier
Troisième jour. Je me cherche des repaires. En box, le matin, ça va bien. Il y fait chaud et on échange avec les copains à côtés. La petite Lady, c’est la plus bavarde. Cela ne m’étonne pas. Et patati et patata et un petite pause entre deux. Elle est comme cela. Elle s’appelle Nubia, il parait que cela signifie nuage en espagnol. Elle vient de là-bas.
La lumière de l’écurie qui s’allume le matin, ça fait cligner mes gros yeux doux. Après ça va. Il paraît que la lumière annonce le petit déjeuner. Ça me va. Le foin toujours aussi odorant et la ration de floconné est tout sauf rationnée. C’est vrai que je ne suis pas en état. Il n’y a rien de trop. J’ai du mal à rester rond. Il parait qu’un dentiste, un ostéo et un véto vont être sur l’affaire. Mais tout ça me dépasse un peu. Les copains sortent. D’abord les deux filles, l’Altesse en premier suivie de la petite Lady. Après un moment, c’est au tour des gars, le patron et le bai. Encore un moment et comme je suis tout seul, j’appelle, j’appelle. J’ai quand même un peu la trouille d’être abandonné, oublié. On ne sait jamais. Cela s’est déjà produit dans ma petite vie de cheval. Alors je suis vigilent, j’appelle pour que l’on ne m’oublie pas. J’appelle.
Et la dame revient enfin. Ouf. Je suis soulagé. Elle a mon licol tout neuf et ma couverture toute sale.
Je suis un gentil cheval. Je me laisse faire. J’ai hâte de retrouver les autres, mais je n’en laisse rien paraître, juste un peu d’inquiétude dans mes gros yeux. Je laisse la dame me couvrir de mon manteau bleu-boue. Et nous voilà tous les deux sortis. Je ne marche pas vite. Je suis un peu perdu en fait. Dans l’herbage, je fais le tour, je tourne et tourne. Je vérifie des choses, des petites choses sans importance mais qui rassurent. La motte d’herbe, oui, celle-ci, elle était bien déjà là hier. La flaque d’eau, aussi. Je suis perdu, je n’ai plus d’habitude. Je veux dire de celles qui bercent le quotidien, qui sont des rambardes rassurantes parce que familières. Et là je n’ai plus rien. Je ne sais pas trop quoi faire de moi. Je suis tout seul dans cet herbage. Patron, m’a aperçu et il revient au grand trot, du haut de ses jambes si hautes qu’on dirait des échasses. Il hennit. Je ne lui réponds pas. Je ne sais pas quoi lui dire. Je suis perdu.
Mardi 13 janvier
Quatrième jour de ma nouvelle vie.
... J’ai appris le nom du Patron, l’alezan monté sur échasse (1m80 au garrot –faut le vouloir pour se retrouver dessus- faut être humain quoi).Il s’appelle Sganarelle. C’est un nom de personnage de théâtre de Molière. S’appeler Sganarelle et être le cheval d’une famille de cavaliers comédiens, cela ne s’invente pas. Il y a des destinées qui sont faites pour se croiser et se lier. C’est sûr. Moi je n’ai pas encore rencontré ma destinée. Mais ça viendra, pas vrai ? J’ai confiance. A demain.
Mercredi 14 janvier 2015
5ème jour
Pas de sortie ce matin. C’est matinée au chaud, dans l’écurie. Nous la partageons avec deux chats blancs aux masques roux et aux yeux bleus. Ils sont cools. Ils dorment en boule dans un coin des boxes. Pas dans celui de Sganarelle en tout cas.
Hier le véto est venu me vacciner. Il a écouté mon cœur. Ben oui j’en ai un et il est à prendre. Il est sympa ce véto. J’ai posé ma grosse tête contre son épaule pour lui faire savoir. En fait je voudrais tellement que l’on s’occupe de moi. Je voudrais exister dans les yeux de quelqu’un, vous voyez ? Parce que si je venais à exister dans les yeux de quelqu’un cela voudrait dire que j’existe pour de vrai, pour de bon. Aujourd’hui, j’ai l’impression de ne pas en avoir le droit … C’est peut-être de cela dont je suis malade. Je ne grossis pas parce que tout cela me ronge.
La grande Altesse alezan aubérisé s’appelle Cirène. Cela fait pile 20 ans qu’elle habite ici. Ca lui donne du grade. Il n’y a que Sganarelle pour remettre en cause la hiérarchie. Ils se font des politesses (oreille couchées, présentation de dentier, balancement d’encolures) de chaque côté de leur clôture. Moi je m’en fiche un peu, je les observe. Je trouve qu’ils en font beaucoup. Moi je suis du genre discret, affectueux et discret. A chacun sa personnalité, pas vrai ?
Jeudi 15 janvier
6ème jour de ma nouvelle vie.
Jour venteux, nom du Dieu Eole ! Ca souffle. Toute la nuit j’ai entendu le vent souffler, gronder, agiter les branchages des arbres. Idem ce matin. Ca, c’est de la tempête. J’aime bien, ça décoiffe les neurones, ça donne des envies de bouger, ça agite la joie de vivre, je ne vous dit que ça. Sortie seulement cet après-midi, tempête oblige. Je ne vous raconte pas, les photos parlent mieux d’elles même. Avec les gars on s’amuse bien. Ca oui, on s’amuse comme des petits fous. Hé, vous savez quoi ? J’ai presque envie de dire que je suis heureux. C’ est cool la vie parfois.
Vendredi 16 janvier
7ème jour de ma nouvelle vie.
Ce matin en allant dans mon herbage, nous sommes passés par la cour devant la maison. Il y avait une setter fofolle. Cette dernière est venue me renifler le dessous des sabots postérieurs pendant que je traversais la cour tranquillement. Je vous l’ai dit j'étais un gars cool. Je n’ai pas bronché du tout. Je l’ai totalement ignoré. J’en ai vu d’autres des Pluto de chez Mickey, gentils mais speed avec le bon sens pas à l'abri.
Va y avoir du travail sur les clôtures, le vent hier il n’a pas que soufflé dans les crinières. Le soleil se lève enfin. Je vous laisse, je vais brouter un brin. A demain !
Dimanche 18 janvier
9ème jour de ma nouvelle vie.
Voilà, je me glisse peu à peu dans un quotidien ou je me suis trouvé quelques repaires : ma couverture bleue maronnée, mon box bien à moi, mon herbage bien vert, mes potos Sganarelle et Ulszlo et les deux juments Cirène et Nubia. A nous cinq, nous sommes une petite communauté. Ca va. Sur Facebook, je lis vos aventures, à vous, copains virtuels des réseaux sociaux. Je suis content de constater que bien des chevaux sont choyés, aimés, dorlotés. ça me donne du courage, cela me donne l’espoir que moi aussi, un jour, j’aurai droit au bonheur.
Hier, les comédiens étaient de retour. Vous savez, ceux qui avaient des appareils photos et des parapluies le jour de mon arrivée. Une jolie dame blonde m’a caressé et a posé des questions sur moi. Dans l’après-midi, de petits comédiens sont venus à la porte de l’herbage. On a échangé des secrets, oui. Comme ce sont des secrets, je ne peux pas en parler. Je suis un confident sûr. Motus et bouche cousue. Un secret, c’est un secret. Ils sont gentils ces comédiens, seulement, ils ne sont pas cavaliers.
Je voudrais dire merci à l’association les Chevaux et les Ailes, et aussi à tous ceux et toutes celles qui sortent des chevaux de la détresse. C’est que l’on passe si vite du grand amour au désert affectif. Le malheur, il a vite fait de vous choper au détour de la vie.
Chanson simple d’un pt’it gars tout simple :
Pt’it malheur, pt’it malheur,
J’te veux pas dans ma vie
Pt’it malheur, pt’it malheur
Un jour j’aurai mon ami
Grand bonheur, grand bonheur
je te dirai oui, oh oui
Grand bonheur, grand bonheur
Je t’appelle et j’ hennis
Tralala tralala
Lundi 19 janvier
10ème jour
Ca pèle ce matin, Ha la vache ! Les herbages sont soupoudrés de neige. On dirait du sucre glace. Glace c’est le mot. Moi, je ne crains pas le froid. Avec un père qui s’appelait Verglas, le froid ? Même pas peur… D’autant que j’ai deux couvertures. Celle du dessous, une noire toute douce, je ne vais pas pouvoir la cochonner comme je veux, vu que j’ai ma bleue maronné dessus. On fera avec. Tant pis.
Je vais vous parler de mon poto Ulaszlo. Je l’aime bien. Il m’aime bien aussi. En fait, l’Ulaszlo, il aime tout le monde. Lui c’est peace and love !
C’est un vrai gosse. Il a 6 ans, mais c’est un moufflet. Ok il est grand lui aussi, au moins 1m75 au garrot. Ulaszlo c’est un vrai cabri. Il saute et bondit des quatre fers. Ce cheval est monté sur ressort. Il pète la joie de vivre, il en est épuisant. Je vous dis que la reprise du travail va être joyeuse. Mais c’est un gentil gars. Son surnom c’est petit gars ou bien gros bébé. Ce n’est pas avec ça qu’il va devenir mature. Lui et Patron ont été sauvés par l’ association des chevaux et des ailes. Il parait même qu’Ulaszlo a bien faillit monter dans le mauvais camion. C’est sa fierté, il n’arrête pas de chanter :
« j’suis pas montééééééé….. dans… le mauvais cami… ion…. Onnn…. Tralalère » et il part à fond de culotte en cabriolant comme un fou.
Je ne sais pas ce que c’est le mauvais camion, lui non plus d’ailleurs, mais ça lui donne de l’importance et apparemment une sacré joie de vivre. Il n’a pas toujours été comme cela. C’est la petite lady Nubia qui me l’a raconté. Au début il était triste parait-il. Un père Noel Belge à paques, l’an dernier, lui a sauvé la vie. Un père Noel à Pâques, allez-vous me dire… c’est la Belgique et une sacrée belle histoire.
« j’suis pas montééééééé….. dans… le mauvais cami… ion…. Onnn…. Tralalère »
Tiens, le voilà qui repasse au grand galop !
Sacré Ulaszlo.
Mardi 20 janvier et mercredi 21 janvier
Bon, hier, c’était journée cooconing. Tout le monde est resté au chaud dans l’écurie. Une question d’emploi du temps et de rendez-vous je crois. Paille et foin à volonté. Les potos et moi nous avons passé la matinée à échanger à renfort de schroum schroum schroum. Moi, je suis un schroumeur lent. Je mange et mâche très lentement. Une tortue de la mâchoire.
Sganarelle, vous savez le grand alezan sur échasses que je surnomme le Patron, il s’ennuyait un brin. Alors, pour s’occuper, il s’est amusé à ouvrir la porte du box d’Ulaszlo. Ce dernier est venu me trouver. C’était amusant cette matinée avec le p’tit jeune en liberté à mes côtés. Heureusement que la porte de l’écurie était fermée et pas accessible aux talents de Sganarelle. C’est la deuxième fois qu’il ouvre une porte. Précédemment, c’était celle de l’herbage.
L’après-midi, une jeune femme dentiste et ostéopathe équin est arrivée. Olala le truc de ouf. Je vous raconte. Au début, on m’a passé un licol un peu plus sophistiqué que le mien. Le licol faisait un bruit bizarre bizarre et je sentais ma bouche qui s’ouvrait toute seule. Vous imaginez le truc ? Un licol avec une mâchoire de fer qui vous ouvre le bec ? On m’a accroché une petite lumière dans le gosier. La dame et la dentiste ont regardé mes chicos et là, surprise des surprises, j’étais un vampire ! Et dire que je ne le savais pas. Vous voyez un vampire dans le genre du film Twilight. J’étais déjà blanco comme le personnage Edward je crois. Et bien j’ignorais que j’en avais aussi les canines, dites donc ! Mais ceci explique bien des choses. Mes dents de vampire avaient tellement poussées qu’elles me coupaient la gencive de la mâchoire du bas. J’ai un tas de cicatrices sur la gencive. Maintenant que je sais que j’étais un vampire qui s’ignorait, je vous le confie, c’est dur, dur la vie avec des dents pareilles. La dentiste elle a ponçé, frotté. Quand elle s’arrêtait, je marchais en rond dans mon box. C’est mon truc à moi pour me déstresser. T’as beau être un gars cool, les vibrations sur les dents, ce n’est pas super agréable. J’ai eu droit à une poignée de floconnés et du foin sous surveillance ensuite afin de vérifier si je schroumais correctement. Il n’aurait plus manqué que je fasse une obstruction des oephages en plus. Mais non, j’ai shcroumé prudemment. Du coup j’ai eu droit à ma ration complète et plusieurs visites en soirée pour me surveiller.
Voilà je voudrais dire que la dame dentiste et qui est aussi ostéopathe, elle a changé ma vie. Je crois que j’en suis déjà conscient. C’est bien possible que je reprenne du poids à présent, non ? La dame est vraiment une grande Dame de cœur, je vous le dit. Elle a été patiente avec moi, gentille, et efficace. Je crois que je vais graver son nom dans mon pauvre petit cœur. Son nom à elle DEBORAH DANEELS 19, impasse de la mare Anson 76440 LE FOSSE 06 59 83 62 65. Elle se déplace loin.
Gravez le dans vos répertoires. Pensez aux dents de vos chevaux, c’est important.
...
Dimanche 25 janvier
Du rififi à OK corral !
Depuis deux jours, la petite Lady, la petite jument blanche espagnole et l’Altesse Royale sont séparées. Elles sont l’une et l’autre dans des herbages mitoyens, mais plus ensemble dans le même herbage. Je ne vous raconte pas les mélodies du matin à la sortie des boxes. Et que ces dames s’appellent, s’agitent. Beaucoup de cinéma et de tralala pour un gars tel que moi, un gars tout simple. Et voilà que ce dimanche matin, sans que je l’ai demandé, je me retrouve dans le même herbage que la petite senorita. Elle est bien mimi avec ces courbes toutes en rondeur, ses petites manières et ses allures relevées. Elle seule sait se déplacer dans la boue avec la grâce d’une ballerine. Et je ne vous parle pas de son regard de braise, maquillé de noir charbon. La petite Lady, c’est toute la splendeur de l’Espagne faite cheval. Moi je suis un gentleman... enfin un « gentlehorse » dirons-nous. Je suis courtois, je me suis présenté avec toute la bienséance de l’art. Gardez vos distances jeune homme m’a-t-elle lançé et j’ai respecté la consigne. Faut laisser le temps au temps. C’est dans l’après-midi que cela s’est corsé. Nous avons vu surgir Bébé gueule d’Amour, Ulaszlo, pas content du tout. Il avait sauté par dessus la clôture de sa parcelle… Et voilà qu’il me cherchait querelle ! Je ne me suis pas laissé faire. J’ai beau être cool, il y a des limites au manque de respect. C’était à celui qui avait l’air le plus menaçant. Et la petite Lady, elle, cherchait à nous séparer en ruant comme si elle était monté sur ressort. Ensuite il y a eu une flopée d’humains qui ont déboulés en écartant les bras. Pauvres humains qui s’imaginent qu’en ouvrant les bras, cela nous fera courir moins vite. J’ai repéré la dame qui s’occupe de moi tous les jours. Je suis allé vers elle au petit trot. Nous sommes rentrés tous deux à l’écurie, et quelques minutes plus tard les deux autres protagonistes ont rejoint leur box respectif. Et c’est là que j’ai compris, lorsque j’ai vu Ulaszlo passer sa tête dans le couloir et regarder en face, la jolie jument blanche. Ulaszlo est amoureux !
Lundi 26 janvier
Chaud les marrons ce matin !
Ulaszlo et Sganarelle ont galopé comme des fous dans l’herbage du haut. Qui a dit que les trotteurs ne savaient pas galoper ? Sganarelle, quand il galope, mazette ! Je ne vous raconte pas les foulées : les échasses en goguette, c’est impressionnant.
Il fait tellement doux, que je suis sorti sans couverture. Je ne me suis même pas roulé… enfin pas tout de suite. J’ai bien l’impression que je grossis un peu. Ulaszlo est venu grignoter le brin avec moi… Hum je ne suis pas trop rancunier. Je passe l’éponge pour cette fois. Ce n’est qu’un gosse amoureux. Tiens le voilà qui passe : «« j’suis pas montééééééé….. dans… le mauvais cami… ion…. Onnn…. ». Trois tours de galop et le voilà qui revient grignoter avec moi. Impossible de lui en vouloir de quoi que ce soit. On reste poto. Amour, amour quand tu nous tiens.
mercredi 28 janvier
Il pleut et il fait froid, et gris. Est-ce que le soleil brillera un jour dans ma vie. Serais-je donc destiné comme le petit cheval blanc de la chanson à ne vivre qu’en hiver et mourir par un éclair blanc. Pourquoi certains ont-ils des maîtres, des cavaliers, des propriétaires ? Quelle méchante destinée a fait de moi un orphelin ? Un sans famille ? Que lui ai –je fais, moi, à cette destinée ? Rien du tout. Suis-je donc condamné à n’être qu’un pauvre cheval blanc, baladé, de famille d’accueil en famille d’accueil. Suis-je responsable de quoi que ce soit ? Dans toutes ces jolies étoiles qui brillent dans le ciel, n’y en aurait-il pas une, une seule qui voudrait bien un petit peu se tourner vers moi ? Avoir une bonne étoile, même petite, même toute petite ? C’est donc si difficile d’avoir quelqu’un à aimer? Dites ? Pourquoi est-ce inaccessible ?
Si vous saviez, j’aimerai tellement, tellement avoir quelqu’un à aimer.
Estimauville - photo d'Anne Laura Patris